Imaginez une société en tout point identique à la nôtre. À ceci près que le sort doterait chacun d’un pouvoir spécial, donnant aux plus chanceux le don de se mouvoir dans les airs, de décrypter les pensées d’autrui, de décupler ses forces ou encore de passer à travers les murs. Si vous aviez moins de chance, vous pourriez par exemple réaliser des origami par la simple force de votre pensée. Ou hériter d’une faculté plus futile encore, voire franchement pénible – je laisse votre imagination concevoir l’ampleur des possibles ! Tout cela aurait beau se résumer à une grande loterie, cela n’en déterminerait pas moins grandement la reconnaissance sociale et le statut de tous. Dans ce monde où chacun serait spécial, le comble de la malchance, ce serait quand même d’être le SEUL à être normal jusqu’au bout des ongles. Et que cette vérité mortifiante soit sur le point d’être révélée à la terre entière par le test que doivent passer ceux dont le pouvoir ne s’est pas révélé spontanément…
En voilà une belle intrigue ! Dès les premières pages, la tension est à son comble. Antoine n’a pas mis deux jours à lire ces 322 pages, attendant ensuite avec impatience que Hugo et moi l’ayons terminé aussi (à voix haute, donc un peu plus lentement !) pour pouvoir en parler…
Kamel Benaouda construit son roman avec brio, brossant peu à peu les portraits (sûrs d’eux, généreux, complexés, anxieux, ambitieux…) de l’entourage de Norman autour d’une trame addictive. L’univers du roman nous a immédiatement séduits par son originalité, la façon dont il s’incarne sous la plume pétillante de l’auteur, son côté décalé qui nous interroge et une élégante parcimonie – puisqu’il est si semblable à notre société après tout. On réalise à quel point cette petite histoire de pouvoirs, parfaitement plausible, change radicalement la donne. L’histoire de Norman est une parabole qui nous interroge sur le hasard, le poids des normes et inégalités sociales, mais aussi sur le pouvoir de la volonté et de l’entraide pour déjouer les déterminismes. Une parabole qui m’a fait un peu repenser au beau film Bienvenue à Gattaca, avec aussi évidemment des clins d’œil malicieux aux histoires de super-héros.
Seules réserves : l’histoire d’amour, qui ne nous a pas passionnés, et le dénouement que nous avons trouvé un peu rapide !
Un roman généreux de rebondissements, d’humour et de sagesse, qui donne envie d’apprécier les différences – et de s’accepter tel que l’on est. Parce qu’il peut y avoir une vie en dehors des prouesses des super-héros.
L’avis de Bouma est disponible ici.
Extraits
« – Ah ! s’extasiait-il, j’aimerais avoir ton âge et ne pas connaître encore mon pouvoir. C’est tout un éventail de possibles qui s’étale devant soi. »
« J’ai entendu l’un de mes camarades maugréer :
– De toute façon, je sais que le mien ne sera pas terrible. Mon père plie le papier par la pensée et ma mère imite des chants d’oiseaux… Que des pouvoirs archinuls !
J’ai soupiré intérieurement. C’était toujours mieux que de ne rien avoir du tout. Son voisin, Rajeev, s’est vanté :
– Nous, au contraire, à la maison, on a des capacités vraiment cool, comme l’inflammabilité, la vitesse hors norme…
Il a assorti la révélation de sa formidable hérédité d’un coup d’œil circulaire, afin de s’assurer que chacun en avait bien pris la mesure. Puis m’avisant, il a fait remarquer :
– Et toi, Norman, on ne t’entend pas. Raconte-nous donc qui fait quoi chez toi ! »
Lu à voix haute en décembre 2019/janvier 2020 – Gallimard Jeunesse, 14,50€
ça a l’air sympa, je vais en parler aux filles 😉 merci pour la découverte
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Bravo pour votre blog, que j’ai découvert via Babelio, contente d’y trouver une critique mitigée de Winterhouse Hotel que je viens de terminer. Ayant notamment fort apprécié Calpurnia et Le Jardin Secret (dont A. Holland a fait un très beau film), je me permets de vous conseiller la lecture de Louis Sachar qui devrait vous plaire, à vous et à vos garçons. Le garçon qui a perdu la face, Un garçon dans les toilettes des filles, Des poissons dans la tête, Le pitre de la classe, Chemins toxiques, Le passage. On (mes enfants et moi) les a tous beaucoup aimés. Le style de Sachar est fluide et prenant et ses histoires et personnages montrent qu’il n’a pas perdu son âme d’enfant. Vous saurez en parler mieux que moi !
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Merci beaucoup Marie pour ce commentaire très sympathique ! Et aussi et surtout pour cette suggestion de découvrir Louis Sachar que je ne connaissais pas du tout. J’ai été regarder ses livres sur Babelio et eu effectivement immédiatement très envie de les lire avec mes garçons. Cela correspond tout à fait à ce que nous aimons 🙂
Avez-vous vous-même un blog, ou accepteriez-vous de m’envoyer votre pseudo pour rester en contact sur Babelio ?
Au plaisir, Isabelle
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La grande forêt, le pays des Chintiens, d’Anne Brouillard, est un des livres que j’ai offerts (attirée par le style – mélange de dessins, texte, BD) à ma fille (11 ans déjà) à Noël, je l’ai parcouru, mais pas encore lu (elle non plus – manque de temps). Vu votre article.
Je n’ai pas de pseudo autre que mon prénom. J’ai un blog, qui n’est pas spécialisé dans nos lectures, qui parle de notre vie en général, culturelle en particulier.
J’espère de tout coeur que vous aimerez Louis Sachar autant que nous.
Anne Fine, avec son Chat assassin, est aussi un « must » de la littérature enfantine… J’ai récemment lu Le passage du diable (offert à ma fille…), qui date de 2015, qui touche, un peu comme WInterhouse Hôtel…, au paranormal, mais qui m’a paru plus réussi, « littérairement parlant ».
Avec mon fils (18 ans déjà, étudiant en dessin) on a adoré Le journal d’un dégonflé, qui nous a ouvert la voie vers ce qu’on appelle aujourd’hui les romans graphiques (des BD inspirées de Persépolis, elle-même inspirée de Maus). Pour ma fille, j’ai acheté pour Noël Un été d’enfer, de Vera Brosgol (russe expatriée toute jeune aux États-Unis). 4 étoiles sur Babelio pour ce livre (qui évoque un camp « scout ») qu’on a bien aimé. Je vais souvent sur Babelio pour lire quelques critiques, mais n’en fais jamais moi-même.
À bientôt, Marie
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Merci beaucoup ! C’est chouette que nos enfants (votre fille et mon fils aîné) aient le même âge, nous pourrons échanger nos trouvailles !
J’ai commandé Le passage de Louis Sachar hier, je vous dirai quand nous l’aurons lu 🙂
Nous aimons beaucoup les livres d’Anne Fine (ayant vraiment une prédilection pour les romans animaliers…), Antoine et Hugo aiment aussi Le journal d’un dégonflé. Je me note Le passage du diable et la BD de Vera Brosgol dont j’ai déjà entendu beaucoup de bien, merci encore !
À bientôt,
Isabelle
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Bonjour Marie ! Un petit mot pour vous dire qu’Antoine a dévoré Le passage, de Louis Sachar, en un seul jour, un grand succès ! Je prévois de proposer à Hugo de le lire à voix haute prochainement 🙂 Encore merci pour cette suggestion de lecture !
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J’en suis fort heureuse ! Merci pour cette nouvelle.
Le garçon qui avait perdu la face et Il y a un garçon dans les toilettes des filles devraient lui plaire aussi… Sont plus courts, et rapides à lire, que Le passage.
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J’adore Olivier Tallec (et son « maître », Voutch), il faut que je me procure C’est mon arbre, dont vous avez parlé dans un autre article.
Il y a Mario Ramos et Michel Van Zeveren aussi qui sont géniaux, dans cette collection Pastel/École des Loisirs…
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Bonsoir, ce petit message pour dire qu’Azeline devient ici Mélissandre et surtout que nous avons commencé la lecture de Norman suite au retour sur Babelio. Mon fils m’a affirmé qu’il serait prêt à prendre le risque d’avoir un pouvoir inutile s’il pouvait choisir d’en avoir un ou pas. A bientôt et merci.
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Oh !!! Merci pour ce retour, cela me fait super plaisir. J’ai hâte d’avoir le retour de ton fils, j’espère qu’il sera aussi conquis qu’Antoine – je suis ravie de voir que ce livre a d’ores et déjà titillé son imagination 🙂 À bientôt et merci à toi !
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