La Clé des Champs, d’Audrey Faulot (Gallimard Jeunesse, 2020)

Pour la plupart des gens, voler, c’est mal. Et bien chez Robine, le chapardage est élevé au rang d’art, de sport, de philosophie. Trimer pour un salaire ridicule, cela ne manque-t-il pas de panache ? Mais voilà : pétrie de scrupules et terrorisée à l’idée de se faire prendre, l’adolescente ne montre aucune appétence pour le vol. Sera-t-elle à la hauteur de la réputation familiale et surtout de la redoutable épreuve de son Initiation ? Le plus sûr, du point de vue de ses parents, est encore de l’envoyer dans un établissement qui remet les jeunes récalcitrants – pour ainsi dire – sur le droit chemin…

« Soit un tunnel à creuser depuis la cellule d’une prison jusqu’à une forêt. Il y a 320 m entre les deux. Le sujet a le choix entre une pelle pouvant extraire 10 cm3 toutes les 5 s, mais exposée à un frottement ralentissant la tâche d’1/15 tous les 50 m, et une pioche pouvant extraire jusqu’à 17 cm3 toutes les 7 s, mais exposée à un frottement ralentissant la tâche d’1/13 tous les 100 m. Quel outil doit-on privilégier ? »

L’existence de Robine est particulièrement angoissante. On ne voit pas bien comment la jeune fille va pouvoir trouver sa place à l’école des voleurs. Et pourtant, elle y découvre un monde moins monolithique qu’elle ne l’imaginait, traversé par des tensions, des doutes et de nombreux secrets… Qui dit secret, dit enquête. Une investigation où tout pourrait se jouer !

Mon moussaillon de dix ans et moi avons aimé lire à voix haute ce roman lauréat du concours du premier roman jeunesse décerné par Gallimard Jeunesse, RTL et Télérama. Le devenir de Robine a piqué notre curiosité et nous nous sommes laissé emporter par la jolie plume d’Audrey Faulot. Son univers est dense, étoffé avec humour et inventivité : les voleurs s’appellent Bonnie ou Arsène, domestiquent des pies, jouent à une version modifiée du Monopoly où il s’agit de braquer un maximum de rues (que mon moussaillon aurait d’ailleurs suggéré d’appeler « Brocoly ») et travaillent durement à leur carrière de cambrioleur, de faussaire ou de conseiller en fraude fiscale. Leurs valeurs morales « inversées » ne manquent pas de piquant.

Cela n’a pas tout à fait suffi pour nous chiper un coup de cœur. Tout va très vite – trop vite – une fois à l’école des voleurs. L’enquête progresse de manière fulgurante et il est très rapidement question de l’Initiation de Robine alors qu’elle est arrivée bien après les autres élèves. En se donnant plus de temps, certains aspects auraient pu être creusés. C’est notamment le cas du rôle des animaux-totems que l’on aurait aimé plus développé. Ou des personnages secondaires dont on peut avoir l’impression qu’une fois « leur » scène respective passée, ils ont tendance à s’effacer à l’arrière-plan.

Cela reste impressionnant pour un premier roman et nous espérons pouvoir lire de nouveau Audrey Faulot dans un futur proche !

N’hésitez pas à découvrir également les précédents lauréats du concours du premier roman, notamment La Passe-Miroir et Norman n’a pas de super-pouvoir.

Extraits

« Bravo, ma petite pie voleuse, disait ma mère en l’embrassant, encore une course-poursuite parfaitement menée ! Viens te mettre à table avec nous, je t’ai gardé du gratin. »

« Les Marchandeurs ont énormément de préjugés sur ceux qui vivent en marge de leur société et qu’ils considèrent de façon abusive comme des voleurs.
– Tout à fait, reprend Miss Maraude. Merci, Main-d’Or. Alors que les voleurs se retrouvent dans toutes les couches de la population, y compris les plus hautes… Pensons aux spécialistes de la fraude fiscale, par exemple. »

Lu à voix haute en janvier 2021 – Gallimard Jeunesse, 14€

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