
La collision entre l’enfance et l’horreur insondable de la guerre nous a laissés silencieux et abasourdis. Elle est d’autant plus poignante que Michal Skibiński s’en tient à l’essentiel, comme les enfants de huit ans savent si bien le faire.
« J’attends la venue de Maman. »
En cet été 1939, en Pologne, le garçon s’acquitte de son devoir d’écrire une phrase par jour, de sa petite écriture appliquée. Ses mots déploient un univers enfantin organisé, comme il se doit, autour des promenades, des jeux, des petits motifs quotidiens d’émerveillements, une montgolfière, une grosse chenille, des moments partagés avec ses proches. Et soudain, cette phrase terrible qui fait tout basculer : « la guerre a débuté ».
« Je me suis caché à l’approche des avions. »
Michal ne s’étend pas plus après qu’avant : une phrase, pas plus. Mais chaque mot résonne, nous fait pressentir le bouleversement irrémédiable de sa vie.


Difficile de prendre la mesure de ce qui s’est passé, essentiel d’entretenir cette mémoire. Ce cahier, conservé pendant toutes ces années, devait être publié et traduit. Ala Bankroft donne vie à ces instants avec beaucoup de sensibilité, dans de très belles peintures impressionnistes en double-page, sans les départir de leur résonance universelle. Le jardin, la forêt, la maison, le ciel où passe un planeur, que l’on voit à travers le regard du narrateur – ce pourraient être ceux de notre enfance. Impensable d’imaginer cela sombrer dans les ténèbres qui envahissent les pages au fur et à mesure qu’on les tourne. Les révélations des dernières pages sur l’histoire de la famille sont bouleversantes.
Une lecture partagée que jamais nous n’oublierons.
Pour en savoir plus : l’avis de Sophie van der Linden et l’émission France Inter L’as-tu lu mon petit loup ? sur cet album.
Lu en décembre 2020 – Albin Michel Jeunesse, 14,50€