
Avec les « Kamo », Daniel Pennac signe une série de quatre courts romans intrigants et captivants : parmi ceux qui m’ont le plus marquée, enfant… Je les avais dévorés peu après leur parution, quand j’avais à peu près l’âge des deux protagonistes, qui sont en CM2 dans L’idée du siècle et en 5ème lors de L’évasion de Kamo, l’épisode final. Ces aventures faisaient partie de celles que j’avais bien envie relire avec les garçons quand ils auraient le même âge. À la demande d’Antoine, qui les a dénichés parmi mes livres de cette époque, nous les avons finalement lus un peu plus tôt, avec toujours autant de succès. Dans la foulée, nous avons prêté L’idée du siècle à l’une de leurs amies (9 ans) qui l’a autant aimé que nous…
L’ingrédient principal des quatre romans est incontestablement une intrigue captivante, distillant des rebondissements à la limite du fantastique dans le quotidien plutôt classique de deux garçons du 18ème arrondissement de Paris – leurs parents, leurs copains, l’école, les devoirs. Une fois amorcée la lecture de chacune des aventures, pas facile de reposer le livre !
Cela dit, les « Kamo » ne sont pas seulement des péripéties palpitantes, mais s’incarnent également dans des personnages attachants si bien esquissés par touches de petits détails qu’on croirait les connaître, l’ironie et l’humour des dialogues, la répartie de Kamo et les situations improbables imaginées par D. Pennac. Chacun des épisodes parle aussi des grandes questions – l’amour, le temps, la mort et l’histoire, avec un grand ou un petit H. Du coup, j’espère que les garçons les reliront un peu plus grands pour profiter pleinement de tout cela…
Extrait
« – Pas question que je monte là-dessus, déclara Kamo.
Il tenait la bicyclette à distance, du bout des doigts, avec une moue de dégoût, comme si elle eût été enduite de confiture.
– Ah, non ? et pourquoi ?
Kamo me jeta un bref coup d’œil, hésita une seconde, et répondit :
– Parce que.
– Tu ne sais pas monter à bicyclette ?
Là, il eut son sourire méprisant :
– Il y a des tas des choses que je ne sais pas faire. Je ne connaissais pas un mot d’anglais, l’année dernière, tu te rappelles ? J’ai appris en trois mois. Alors le vélo…
– Eh bien, justement, tu vas apprendre en deux heures.
– Non, je n’apprendrai pas.
– Pourquoi ?
– Ça me regarde.
Patience. Je connaissais mon Kamo, ce n’était pas le moment de l’énerver.
– Kamo, Pope a réparé cette bécane spécialement pour toi.
Il fronça les sourcils.
– Je suis désolé.
– Une bécane historique, Kamo. Elle a fait la Résistance. Elle a même échappé à une embuscade des Allemands. Tiens, regarde.
Un genou à terre, je lui montrai les deux impacts de balle. L’une avait perforé le cadre (juste entre le mollet et la cuisse de grand-père qui n’avait jamais pédalé aussi vite de sa vie), l’autre avait troué le garde-boue arrière (grand-père était passé…). Pope, mon père, n’avait pas voulu réparer les dégâts. Il pensait que ces traces héroïques plairaient à Kamo.
– Je suis désolé pour ton père vraiment, mais je ne monterai pas sur cette bicyclette. »
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