The nice house on the lake, de James Tynion IV et Álvaro Martínez Bueno (Urban Comics, 2023)

On est quelque part entre Agatha Christie et Cormac McCarthy (je vous jure !) : imaginez une villa luxueuse donnant sur un lac en marge de tout, un hôte mystérieux, une dizaine d’invités qui ne savent pas vraiment de quoi il s’agit. Et, au loin, peut-être la fin du monde.

Le premier tome de ce diptyque impressionne à tous les niveaux et je ne suis pas surprise qu’il ait raflé le fauve de la meilleure série à Angoulême l’année dernière.

L’objet-livre est splendide – couverture épaisse, beau papier glacé, pagination généreuse (188 pages tout de même !). Dès l’ouverture, j’ai été séduite par une patte graphique originale, presque expressionniste dans certaines cases, et travaillée dans ses moindres détails pour composer une atmosphère angoissante.

La narration est impeccable aussi. Déclinée sur plusieurs modes – images ravivées par les souvenirs des personnages, extraits de mail, captures d’écran de smartphone, notes des personnages, énigmatiques scripts de leurs échanges, elle joue sans aucun temps mort sur les va-et-vient temporels : on suit les protagonistes dans leur installation dans leurs nouveaux murs et leurs recherches pour tenter de comprendre ce qui leur arrive. Mais l’histoire est ponctuée de flash-back qui éclairent progressivement ce qui les lie et composent un portrait de l’hôte-mystère. Et quelques visions du futur laissent entrevoir l’ampleur des dégâts à venir. Tout cela est très intrigant, d’autant que si on est attentif, on remarque certains décalages entre passé et présent qui nous mettent la puce à l’oreille – notamment, tous les invités sont-ils bien là ? Je suis très curieuse de suivre l’évolution de la tectonique des relations au sein du groupe et d’en savoir plus sur ce qui se passe dans le reste du monde.

Le livre a quelque chose de très cinématographique qui fait aussi penser à une série, découpées en épisodes avec chacune son générique. On pense aussi aux jeux de rôles (jeux vidéo ou jeux de plateau) puisque chacun semble avoir un « titre » (l’artiste, le journaliste, etc.) et un rôle associé. Je n’ai pas toujours trouvé évident de m’y retrouver vu le nombre de personnages désignés tour à tour par leur prénom et leur titre et représentés dans différentes tenues et à différents âges, sachant que certains ont bien changé… Mais c’est une belle idée de mêler les univers de la BD, des séries et du jeu. Et j’ai apprécié les réflexions inspirées par cette lecture sur notre époque, l’expérience du confinement, les dilemmes d’action collective.

Si la maison se trouve dans le Wisconsin, j’inclus ce titre dans ma série new-yorkaise parce qu’une partie de l’intrigue se noue à New-York, dans un Brooklyn estudiantin, festif, artiste et queer. Une atmosphère réminiscente de notre découverte du quartier de Bushwick où nous avons eu la chance de tomber sur Caty Wooley, une street-artiste qui nous a montré les œuvres très chouettes que son collectif déploie un peu partout.

Source de la carte : Open Street Map (Open database licence)

L’un des personnages de la BD est d’ailleurs le sosie de Jean-Michel Basquiat (natif de Brooklyn), représenté (avec le rappeur Notorious BIG, également originaire de Brooklyn) sur l’une des fresques murales que nous avons immortalisées lors de notre balade.

Bref, n’hésitez pas à découvrir ce huis clos pêchu, angoissant et très, très intrigant ! Et à découvrir Bushwick si vous vous rendez à New-York !

Lu en janvier 2025 – Urban Comics, 18€

7 commentaires sur “The nice house on the lake, de James Tynion IV et Álvaro Martínez Bueno (Urban Comics, 2023)

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  1. Une BD qui semble originale. Les images que tu montres me plaisent beaucoup (celle avec le gars et l’éclair en fond tout particulièrement). Merci pour la découverte !

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