La maison sous la maison, d’Emilie Chazerand (Sarbacane, 2023)

« Vieille dame donne sa maisons
à la famille qui saura l’aimer,
l’écouter et en prendre soin.

Et, juste en dessous, un numéro de téléphone.
C’était une offre bien étonnante. Trop généreuse pour être honnête, penseraient quelques-uns. Et aussi, depuis quand devait-on « écouter » une maison pour pouvoir y vivre ? Ah et cette faute, là : une « maisons » avec un s…
Ça ne mettait pas en confiance.
Ça ne faisait pas sérieux.
Mais Fiammetta Gordes savait parfaitement ce qu’elle faisait. Elle avait choisi chaque lettre de chaque mot, scrupuleusement, après avoir réfléchi longtemps à cette annonce. »

Ce roman mérite la palme de l’incipit le plus intrigant ! Une annonce étrange, une vieille dame particulièrement originale, une maisons de conte (oui il y a bien un « s », vous verrez cela s’explique)… Notre curiosité est piquée, on sait immédiatement qu’on a affaire à un roman singulier. Car il y a aussi cette narration vive et malicieuse qui nous interpelle, nous prend à partie et crée d’emblée une connivence.

Le rendez-vous est donc pris pour visiter la fameuse maisons, en compagnie d’une famille qui sort de l’ordinaire. On s’y aime fort mais la vie n’est pas toujours facile pour Albertine, la cadette, plus à l’aise avec sa plante verte qu’avec les filles de son école. Elle l’ignore encore, mais la rencontre avec cette demeure n’est que le début d’une aventure initiatique riche en péripéties, en rencontres et révélations vertigineuses !

Il règne sur ces pages gorgées de fantaisie un esprit d’enfance digne de Roald Dahl (j’ai pensé notamment à l’inventivité de James et la grosse pêche), mais avec une jolie touche contemporaine qui permet à Émilie Chazerand d’évoquer les familles multicolores, les désagréments du diabète, la plaie du harcèlement ou encore nos liens à la nature. Cette autrice sait décidément doser à la perfection la touche de noirceur à même de mettre une histoire sous tension et ce qu’il faut de féérie pour nous transporter et nous réconforter. Quel bonheur, d’ailleurs, de retrouver de beaux liens fraternels comme on les avait déjà aimés dans Annie au milieu. Et de voir une petite fille trouver sa voie de la plus incroyable des manières.

Un titre à avoir en tête à l’approche de Noël : ce roman qui est aussi un magnifique objet illustré, insuffle à nos imaginaires le rêve d’un monde-miroir qui viendrait remettre nos pendules à l’heure.

Lu en novembre 2023 – Sarbacane, 16,90€

7 commentaires sur “La maison sous la maison, d’Emilie Chazerand (Sarbacane, 2023)

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  1. Intéressant ! J’avoue que la présentation de ce titre m’a laissé perplexe et je n’ai pas osé encore ne serait-ce qu’envisager de le lire… Ta chronique intrigue tout autant mais te connaissant, je sais que si tu as aimé, je peux y aller presque les yeux fermés 😀

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    1. Qu’est-ce qui t’a rendue perplexe ? Je dirais que c’est un roman qui mêle le registre du merveilleux et un ancrage dans le réel, un peu comme le faisait Violette Hurlevent et le jardin sauvage dans la même collection, que j’avais beaucoup aimé aussi. Ma seule réserve (qui s’applique d’ailleurs aux deux titres) serait sans doute un côté un peu foisonnant. Il y a un univers très inventif et une intrigue qui ne cesse de rebondir sur une période très courte (l’essentiel de l’action se déroule en 24h), ça semblera peut-être un peu déboussolant à certains lecteurs mais en même temps, le rythme soutenu incite à lire ce texte d’un trait 🙂

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