Docteur Dolittle, de Hugh Lofting, illustré par Ole Könnecke (L’école des loisirs, édition de 2019)

« Mais je préfère les animaux à la bonne société. »

Le docteur Dolittle est l’ami des bêtes, il héberge chez lui une véritable ménagerie ! Étroits d’esprit (compatissons tout de même avec la pauvre dame qui s’est assise sur le hérisson), les gens ne comprennent guère cette passion et les patients se faisant rares, le brave médecin se retrouve bien en peine de faire face aux factures de croquettes. Qu’à cela ne tienne : ses talents profiteront désormais aux animaux, qu’ils soient de son village de Puddleby-on-the-March, ou des contrées plus lointaines qu’un mal mystérieux dévaste… C’est parti pour une aventure 100% improbable !

Ce roman né des lettres adressées par Hugh Lofting à ses enfants pendant la Grande guerre porte l’empreinte des mentalités de cette époque, par exemple cette manière de parler de « l’Afrique » comme si c’était un pays… Pourtant, il reste très moderne sur d’autres aspects qui justifient pleinement sa réédition par L’école des loisirs en 2019, à commencer par sa fraîcheur, sa fantaisie intemporelles. Voilà de quoi régaler encore longtemps les adeptes de l’humour anglais ! À chaque ligne, ou presque, se déploient une ironie et une loufoquerie toute britanniques (je vous laisse en juger par les extraits ci-dessous) : voyez donc ce bonhomme, poches percées et cœur sur la main, qui ne prend (une vague) conscience de l’intérêt du ménage qu’après le départ de sa sœur (figurez-vous qu’elle n’a guère goûté l’adoption d’un crocodile) ou qui emporte du pudding dans ses valises (il paraît que c’est introuvable une fois franchie la Manche).

Convaincu qu’il communique avec les chats en clignant des yeux, mon moussaillon cadet a adoré cette histoire. Les dialogues sont complètement farfelus mais le fond n’est pas piqué des vers. C’est fascinant de voir les comportements humains passés au révélateur du regard des animaux. Et joli de méditer les valeurs d’entraide et d’ouverture d’esprit portées par ces derniers.

Un chouette cocktail mêlant comédie burlesque, roman d’aventure et réflexion philosophique. À découvrir aussi pour l’influence que ce texte a sans doute eue sur la littérature jeunesse du dernier siècle !

Extraits

« Nous, les perroquets, annonça fièrement Polynesia, nous connaissons deux langages, celui des humains et celui des oiseaux. Si je dis « Polly veut un biscuit », vous me comprenez. Mais écoutez ceci : ‘Ka-ka oi-ii, fi-fi ?’
– Bon Dieu ! s’exclama le docteur. Qu’est-ce que cela signifie ?
– Dans le langage des oiseaux, cela veut dire : ‘Est-ce que le porridge est encore chaud ?’
– Ça, par exemple ! s’exclama le docteur. »

« La semaine dernière, il a essayé de m’appliquer un cataplasme.
– Où cela ? demanda le docteur.
– Oh, fit le cheval, nulle part – en tout cas, pas sur moi. Il a juste essayé, car je l’ai balancé d’un coup de pattes dans la mare aux canards.
– Bravo, fit le docteur. Oui, bravo !
– En règle générale, je suis plutôt calme, dit le cheval, très patient avec les gens, et je ne fais pas beaucoup d’histoires. Mais j’avais déjà dû supporter ce vétérinaire et son traitement imbécile. Alors, quand ce grand nigaud tout rougeaud a commencé à faire le pitre avec moi, je n’ai pas pu me contenir. C’en était trop. »

« Je pensais aux humains. Ils me rendent malade. Ils s’imaginent être formidables. Ils sont sur terre depuis des milliers d’années, non ? Or la seule chose qu’ils ont réussi à comprendre du langage des animaux, c’est que lorsqu’un chien remue la queue, cela veut dire qu’il est heureux. »

« Les poussemoi-tiretois sont aujourd’hui une espèce disparue. Cela veut dire qu’il n’en existe plus. Il y a longtemps, à l’époque où vivait le docteur Dolittle, il en restait quelques-uns dans les jungles les plus profondes d’Afrique ; toutefois, ils étaient déjà très, très rares. Les poussemoi-tiretois n’avaient pas de queue, mais une tête à l’avant du corps et une autre à l’arrière, chacune ornée de cornes pointues. Ils étaient très farouches et extrêmement difficiles à attraper. »

Lu en juin 2023 – L’école des loisirs, 12,50€

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