Minuit Passé, de Gaëlle Geniller (Delcourt / Mirages, 2024)

Tout, dans ce volume, respire le vieux manoir anglais : tranche aux allures de tapisserie florale, dorures du titre, décoration chargée aux accents victoriens, portraits aux murs qui semblent nous suivre du regard… Et cette odeur de poussière – bon, pas vraiment, mais on jurerait presque la sentir en tournant les pages. On devine tout le plaisir qu’éprouve Gaëlle Geniller à dessiner les splendides finitions des meubles, ornements et vêtements. Et à provoquer le doute : le tic-tac d’une horloge, des ombres fuyantes, des grincements : tout cela compose une atmosphère néogothique où l’on frissonne de voir un père et son fils, seuls, reclus. Que font-ils, ainsi isolés ? Pourquoi ne dorment-ils pas la nuit ? Sont-ils en danger ?

L’autrice-illustratrice aime les fleurs, toujours empreintes chez elle d’un parfum poétique. Ici, le décor entre ombre et lumière interroge : sommes-nous dans un conte ? Doit-on s’attendre à quelque chose de fleuri ou de terrifiant ? Ne comptez pas sur moi pour vous en dire plus !

L’histoire est mystérieuse et plaisante, mais les moussaillons et moi avons surtout été séduits par l’esthétique des décors et des costumes. Les couleurs notamment sont splendides. Nous sommes un peu moins convaincus par les traits anguleux des visages. Mais nous avons apprécié la tendresse de la relation père-fils (avec de très belles scènes de lectures du soir) et la réflexion sur la confiance en soi tissée en arrière-plan.

Un roman graphique cossu comme une maison victorienne, à savourer de préférence pendant une insomnie. Merci à Linda et à Alexandra de nous avoir donné l’envie de nous y aventurer !

Lu en mars 2025 – Delcourt, 25,50€